Un ‘aurélianus’ émis dans la troisième officine (marquée C) de l’atelier de
Lyon présente l’association d’un
avers pour Numérien Auguste (
IMP C NVMERIANVS
AVG avec un buste B : radié,
cuirassé, de
face, vers la droite, correspondant au deuxième
type de buste utilisé en tant qu’Auguste) et d’un
revers (
PRINCIPI IVVENTVT) appartenant à la période du Césarat
des fils de
Carus. Cet ‘aurélianus’ est donc un hybride (poids: 3,05 g.). Il n’est pas répertorié dans le corpus de P.
Bastien (ni dans ses deux suppléments). Un exemplaire issu
des mêmes coins figure toutefois sur le site Othila.
Le classement de ce nouvel ‘aurelianus’ hybride de Numérien apparaît assez délicat dans la mesure où il résulte de coins appartenant à
des émissions qui ne sont pas successives.
En effet, son
avers appartient à la 6éme émission (habituellement
datée de août 283 au début de 284), et plus pré
cisément à une deuxième phase comportant pour Numérien le buste B, confirmation en étant donnée
par une liaison de coin d’
avers avec, entre autres, le n° 544c de
Bastien (
revers MARS VICTOR). Mais, son
revers, remonte à la 3éme émission (novembre-fin 282), confirmation en étant, pareillement, donnée
par une liaison de coin de
revers avec, notamment, les n° 485b et c de
Bastien (supplément II). Il s’agit de deux monnaies de Carin César avec un buste exceptionnel appartenant à un ensemble d’
avers assez homogène, avec de nombreuses liaisons de coins d’
avers et de divers
revers, frappées dans l’officine C.
Ultérieurement cette 3éme officine (C) sera progressivement dédiée à Numérien, après sa nomination comme César, au cours de la 4éme émission
datée du début 283 et elle émettra alors ce
type pour celui-ci. Néanmoins une frappe avec ce coin spécifique, qui aurait donc continué à être utilisé pour Numérien César au titre de la 4éme émission, ne semble pas être actuellement répertoriée ou illustrée.
Les liaisons de coins de cet hybride impliqueraient un écart maximum d’environ un an (fin 282-début 284) entre deux frappes : une grande longévité pour un coin de
revers commun, et qui plus est spécifique à la période
des Césarats et donc moins susceptible de confusion que les
revers PAX AVG(G) impliqués dans diverses hybridations.
En fait, ce délai peut être réduit -et encore plus fortement si une frappe pour Numérien au titre de la 4éme émission était retrouvée-
car deux moments du monnayage de la 6éme émission semblent particulièrement susceptibles d’avoir été l’occasion de la création de cet hybride : les frappes liées à la promotion de Numérien à l’Augustat ou celles appartenant à la 3éme phase de son monnayage, quand s’additionnent les
types de
revers, après la mort de
Carus.
Les ‘auréliani’ hybrides liés au passage de Carin et de Numérien du rang de César à celui d‘Auguste sont relativement nombreux dans les ateliers italiens (
Ticinum et
Rome), issus
des officines qui leur sont alors réservées, signalant ainsi, à ce moment, une continuité
des frappes, notamment celles de séries spécifiques lors de la promotion à l’Augustat. Ces hybrides résultent de la combinaison d’un
avers d’Auguste avec un
revers relevant du Césarat et plus rarement d’un
avers du Césarat couplé à un nouveau
revers correspondant à l’Augustat. Dans ce dernier cas l’utilisation d’un
avers dépassé relève de l’erreur;
par contre la combinaison d’un
avers nouveau (Auguste) et d’un
revers datant du Césarat correspond plutôt aux contraintes liées à la mise en route rapide d’une frappe reflétant la nouvelle situation institutionnelle et aux accommodements acceptables qui l’accompagnent nécessairement.
A
Lyon l’existence d’hybrides lors du passage vers l’Augustat n’est pas aisément
repérable compte tenu de la continuation de la frappe
des mêmes
revers (PRINCIPI IVENTVT puis
MARS VICTOR et
SAECVLI FELICITAS), certains transférés, en outre, d’un César à l’autre, et maintenus lors du passage du Césarat à l’Augustat de Carin puis de Numérien.
Néanmoins, pour Numérien Auguste, l’utilisation de deux
types de bustes différents (A2-hérité du Césarat- puis B) signale une période de transition dans les frappes, impliquant leur probable continuité entre la 4éme émission et cette première phase de la 6éme émission. Ainsi le début de la 6éme émission, entérinant la toute récente promotion à l’Augustat de Numérien comme celle, antérieure, de Carin, doit très probablement être avancé à mai/juin 283. Même si on ne peut pas exclure une utilisation partiellement concomitante
des deux
types de bustes (A2 puis/et B), un hybride créé lors de la promotion de Numérien à l’Augustat devrait, logiquement, comporter à l’
avers un buste du premier
type (buste drapé,
cuirassé, de dos-A2), similaire à celui utilisé en tant que César, accompagné de la nouvelle titulature et non pas un buste de
type B.
Aussi est-ce possiblement la révision de la composition de la 6éme émission dans sa dernière phase qui permet de placer, au mieux, cet hybride dans la suite
des frappes lyonnaises. Sa fin, provoquée
par la mort de
Carus, est à fixer à août/septembre 283. Et sa composition doit comporter, après à la disparition de celui-ci, une troisième et dernière phase constituée d’un monnayage ‘patchwork’ en faveur de Numérien qui cumule les
types de
revers (
PAX,
MARS,
VIRTVS -2 types-,
PACATOR et dorénavant
PRINCIPI IVVENTVT) notamment dans son officine C. La réutilisation d’un coin dépassé depuis plusieurs mois avec un buste du 2éme
type (B:
cuirassé, de
face, vers la droite) constituerait donc un nouvel élément de ces frappes, en partie improvisées, effectuées après la mort de
Carus. Le poids faible de cet ‘aurélianus’ orienterait aussi dans cette direction. Cette 3éme et dernière phase couvre la période entre la nouvelle de la mort de
Carus et la mise en route de l’émission de
consécration de
Carus (
DIVO CARO
PIO) dans les quatre officines (août-septembre 283).
Dans l’é
tat actuel de la documentation il est difficile de trancher définitivement en faveur de cette dernière option. Néanmoins, de façon générale la datation
des émissions
monétaires de la période 283-284, tant à
Lyon qu’à
Siscia et à
Rome, repose sur une chronologie très étalée qui est imposée
par une date trop tardive attribuée à l’usurpation de Julien de Pannonie (fin 284/début-mi 285). La datation de cette rébellion à l’automne 283 permet de rétablir, notamment à
Lyon et à
Siscia, dès l’été 283, le rythme soutenu
des frappes de cette période, en liaison et en
cohérence avec les principaux événements, en particulier institutionnels et dynastiques, nombreux lors de cette première phase du règne de ‘
Carus et sui’, et les besoins financiers supplémentaires du trésor
impérial qu’
ils provoquèrent.